mardi 28 mai 2013

Faire évoluer les Pays: "Penser local, agir local"


Créés dans les années 1970 avec les premiers contrats de plan puis de projet Etat-région (CPER), les pays ont été consacrés juridiquement par la loi 95-115 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 (LOADT ou loi Pasqua) puis par la loi 99-533 d’orientation pour l’aménagement et le développement durable du territoire du 25 juin 1999 (LOADDT ou loi Voynet). Circonscriptions d’action publique locale, ces structures diverses sont intéressantes tant par l’efficacité de leur action de proximité et la prise en compte nouvelle des intérêts locaux que par les expériences de démocratie participatives qu’elles peuvent constituer.


Quelques chiffres :
_ La France compte 367 pays au 1e janvier 2012 et 25 contrats développement durables Rhône-Alpes (CDDRA, assimilables aux pays).
_ 78% du territoire national est couvert par les pays, ce qui représente 50% de la population métropolitaine.
_ Un pays regroupe en moyenne 78 300 habitants soit 81 communes (81,9% du total) et 6,8 EPCI (80,2% de l’ensemble) et s’étend sur 1 262 km².
_ Le budget moyen des pays est de 600 000€ (34% en provenance des EPCI, 31% des régions et 20% des crédits européens). Il se répartit entre l’ingénierie territoriale (70%) et des investissements locaux (30%).
_ Un pays en moyenne a 5,7 EPT.

I  Bases juridiques des pays

1°) Un concept juridique en équilibre instable

Auparavant bien établis dans le droit, les pays étaient régis par l’article 22 de la LOADT (non codifié). Il était alors possible de créer des pays sur le périmètre d’un regroupement d’EPCI à fiscalité propre. Ce périmètre devait recouvrir un territoire qui présentait une cohésion géographique, économique, sociale, culturelle… Cet article était précisé par le décret 2000-909 du 1er septembre 2000 (portant application de l’article) sur les modalités de création et de fonctionnement des pays.

La loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 a supprimé les bases législatives des pays par ses articles 51 et 52 en abrogeant toute référence aux pays dans le droit. Cette abrogation formelle de l’art. 22 LOADT et implicite du décret du 1er septembre 2000 induit l’impossibilité de créer de nouveaux pays et fragilise ces structures.

2°) Des formes variées de Pays

Les pays n’ont pas de structure commune. Ainsi, cette appellation recouvre 53% de syndicats mixtes (18% ouverts et 35% fermés, réservés aux communes et EPCI), 30% d’associations loi 1901, 4% de groupements d’intérêt public et 13% de structures diverses (EPCI, fédérations d’EPCI…)

En quelque sorte, l’achèvement urbain du pays s’est fait par les Pôles métropolitains. Créés par la loi du 16 décembre 2010, ces syndicats mixtes fermés concernent les zones de plus de 300 000 habitants regroupant au moins un EPCI de 150 000 habitants. C’est un cadre souple qui permet une plus grande coopération plus intégrée sur certains domaines. Le Pays de Brest est un des exemples des pays qui se sont transformés en pôles métropolitains.

II Un cadre d’action publique intéressant

1°) Penser local, agir local

Le concept de pays est issu de la prise en compte des particularismes locaux dans le cadre de l’action publique. La pertinence des périmètres est ainsi basée sur un bassin de vie. Le pays a un rôle fédérateur et stratégique à long terme sur le développement territorial.

2°) Des outils participatifs

Définis par la loi Voynet, les conseils de développement sont le complément participatif du conseil d’administration des pays, composés essentiellement d’élus. Ces assemblées issues de la société civile sont porteuses des nouvelles pratiques de la gestion locale des pays. Les conseils de développement sont pensés comme des lieux de débat pour optimiser la relation entre représentation politique et expression participative. Leur composition varie d’un pays à l’autre (de 60 membres à plus de 350 dans certains cas).
Ils ont pour mission d’élaborer, de réaliser et d’évaluer la charte de pays.

La charte de pays est le document de référence qui définit la stratégie territoriale du pays en matière de développement socioéconomique, de gestion de l’espace et d’organisation des services. Elle constitue des engagements réciproques entre les parties membres du pays et ont un horizon minimal de 10 ans.

3°) Des actions efficaces

Le pays est une structure de mutualisation territoriale. Ainsi, il est une structure support de l’action territoriale en développant une ingénierie territoriale au service des communes et EPCI membres. La moyenne de 5,7 EPT par pays est prévue pour répondre aux demandes des communes en particulier sur des questions d’aménagement du territoire.
Les différentes actions des pays recouvrent un grand nombre de domaines qui varient d’un pays à un autre. Mais, on peut retrouver des actions communes et plutôt harmonisées comme l’élaboration de SCOT à l’échelle des pays et l’élaboration d’Agendas 21 de pays.

Le pays est également une structure de gestion de fonds régionaux et européens. Ainsi, les pays sont chargés de la mise en œuvre du volet territorial des CPER dans le cadre des contrats régionaux de pays. C’est le moyen majeur de mise en œuvre des chartes de pays.
De plus, les pays sont également gestionnaires des programmes européens LEADER de développement rural via les groupements d’intérêt locaux (GAL).

III Propositions d’évolution des pays

1°) Préalable : redonner une base législative aux pays

Première nécessité si l’on considère que les pays sont une circonscription d’action locale cohérente, il faut abroger les articles 51 et 52 de la loi du 16 décembre 2010.
Cette abrogation remettrait en vigueur l’article 22 de la LOADT et son décret d’application. Mais cela ne suffit pas et il faut faire évoluer les structures existantes et harmoniser certaines pratiques.

2°) Evoluer sur les structures

La diversité des pays amène à penser qu’il faut réfléchir à une structure comme pour les pays. Pour reprendre la proposition de l’APFP en l’amendant, il serait intéressant de créer par la loi un syndicat mixte d’aménagement du territoire ou pôle de développement rural, pendant rural des pôles métropolitains. Sur les mêmes bases juridiques mais en enlevant toute référence de seuil, ce nouveau type d’association d’EPCI permettrait d’être un moyen de coopération souple entre les EPCI ruraux.
De plus, il est nécessaire de sécuriser la contractualisation territoriale en reprécisant ses modalités. Il faudra également réfléchir à la facilitation des transformations juridiques des pays en syndicats mixtes, en particulier en ce qui concerne les associations. Enfin, il est intéressant de réfléchir à donner un rôle consultatif aux conseils de développement sur le modèle des conseils économiques, sociaux et écologiques régionaux (CESER).

3°) Harmoniser les pratiques


Enfin, des évolutions non juridiques peuvent être poussées par la mutualisation des bonnes pratiques. Ainsi, l’élaboration d’une charte nationale – incitative – des pays est une option qui peut être envisagée pour harmoniser le contenu des chartes de pays et la composition des conseils de développement.

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