Actuellement,
l'un des maillons essentiel de notre système de santé est le médecin
généraliste ou spécialiste installé à son compte. Pourtant leur mission de
santé publique est entachée par un système mal encadré qui pousse à des
logiques individualistes et de profit. Il faut, en préparation du projet de
2012, réfléchir à comment encadrer ces médecins en vue d'un meilleur système de
santé et de sécurité sociale. Ce projet sera déjà compliqué à mettre en place
en vue de son caractère révolutionnaire et de l'importance institutionnelle des
syndicats corporatistes de médecins mais il faudra nécessairement réformer sur
ce sujet. L'encadrement plus contraignant de la profession permet d'apporter
une réponse forte aux problèmes sans passer par une fonctionnarisation
immédiate de la médecine libérale qui mènerait à un braquage de la profession
et à un potentiel échec.
Vers la territorialisation de la médecine libérale
Le
maillage territorial des médecins n'est pas le meilleur en France. On peut
remarquer que même si la moyenne du nombre de médecins par habitant est l'une
des plus élevée d'Europe avec 340 médecins pour 100 000 habitants, la
répartition est très inégale sur tout le territoire. En effet, les zones
urbaines et les régions Île de France et PACA sont les plus dotées en médecins
avec une moyenne supérieure à 373 médecins pour 100 000 habitants. De
véritables déserts médicaux couvrent le reste du territoire. Les zones rurales
sont les plus touchées et il n'est pas rare de se déplacer de plusieurs
dizaines de kilomètres pour trouver un généraliste. Ces inégalités
territoriales sont issues d'une absence de réglementation quant à
l'installation des médecins. Ces derniers s'installent donc où ils veulent selon
des logiques urbaines ou héliotropiques.
Les
seules mesures pour tenter de régler ce problème et assurer un maillage
territorial ont été de simples mesures incitatives sur le plan financier et une
modulation régionale des numeri clausi; sans grand succès. Il faut
passer a des mesures contraignantes.
Une autre
profession de santé, quant à elle, observe un maillage territorial
satisfaisant: les pharmaciens. L'implantation des pharmacies est régie et
contrainte par le code de la Santé Publique selon la règle suivante: en moyenne
– sans plonger dans les détails – une pharmacie pour 2500 habitants en milieu
rural et pour 3500 habitants en milieu urbain.
En
prenant exemple sur les pharmaciens on pourrait alors contraindre
l'installation des médecins dans les territoires. Il suffit pour cela de
réglementer l'ouverture des cabinets individuels selon une règle démographique
simple qui pourrait varier selon la nature du territoire (rural ou urbain):
tant de médecins pour tant d'habitants. Le but pourrait être dans un premier
temps de tendre à une moyenne de 340 médecins pour 100 000 habitants sur tout
le territoire et donc de supprimer les déserts médicaux.
Pour
cela, on ne peut opérer une migration forcée de tous les médecins déjà
installés "en trop" sur tout le territoire. Une territorialisation
progressive des nouveaux médecins doit être mise en place. Ainsi, les jeunes
médecins sortant de l'université se verraient contraints à s'installer dans des
zones de désert médical. Il faut tendre à moyen terme à l'égalité
territoriale nationale. Il faudrait bien sur coupler à cette obligation une
aide financière à l'installation de ces jeunes médecins prise en charge par
l'Etat et continuer de favoriser l'installation des médecins déjà expérimentés
dans ces zones.
Pour la contractualisation des médecins libéraux
Les
médecins généralistes et spécialistes sont actuellement rémunérés à l'acte.
Cela signifie qu'ils facturent pour chaque consultation un montant pré-défini à
la Sécurité Sociale et au patient (via la franchise médicale). Les tarifs de
ces consultations sont, au plus bas c'est à dire en secteur 1, de 22€ pour un
généraliste et de 25€ pour un spécialiste. Ceux-ci peuvent monter très haut dès
lors que le médecin applique des honoraires libres.
On
blâme sans cesse les patients de manque responsabilité quant à leur fréquence
de consultation. Certes le système pousse à ce que la consultation soit
fréquente. Mais ce n'est pas le patient qui porte la responsabilité mais le
type de rémunération des médecins. Plus la fréquence de visite d'un patient est
grande, plus la rémunération du médecin sera conséquente. Consciemment ou
inconsciemment, les médecins poussent donc leur patients à revenir souvent les
consulter ou même pire à ce que les médecins écourtent les consultations pour les
"enchaîner". C'est ce risque de négligence du patient au profit de
logiques économiques que nous devons combattre en réformant le mode de
rémunération des médecins libéraux.
On peut
par conséquent s'inspirer du système britannique de rémunération des médecins
libéraux qui s'inscrit pour ce volet – même si le reste du système britannique
s'inscrit dans un modèle plutôt libéro-beveridgien – dans un modèle beveridgien
où l'accès à la santé est gratuit pour tous. En effet, les médecins
britanniques sont liés au NHS (National Health System) et à l'Etat par un GSMC
(General Medical Services Contract), un contrat de rémunération selon plusieurs
critères. Avec un tel système de rémunération, la Sécurité Sociale payerait
directement le médecin à la fin du mois. La responsabilité financière en terme
de santé publique ne reposeraient donc plus sur les assurés et il serait alors
inutile de leur faire payer des franchises médicales.
Ce
contrat de médecine libérale (CML) définirait la rémunération d'un médecin de
la manière suivante. Un revenu minimum garanti constituerait une base qui peut
être modulée selon la spécialité du médecin (mais cette modulation ne devrait
être fonction que du matériel nécessaire à la spécialité). Il faudrait ensuite
rajouter à ce minimum un complément déterminé par plusieurs facteurs qui
restent ouverts à discussion. Mais nous pouvons déjà poser quelques jalons à
ces critères: la taille de la patientèle, la zone géographique et la
qualité du service en terme d'efficacité médicale de traitement et de prise en
charge mais surtout pas d'efficacité comptable et d'économie pour la Sécurité
Sociale.
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